InnoPark fait grincer des dents

Le centre romand d'accompagnement de chômeurs très qualifiés a ouvert récemment à Yverdon. Selon certains, il aurait pu s'installer à Fribourg en 2004 déjà.

Simple, le concept d'InnoPark: il s'agit d'une mesure d'accompagnement et de réinsertion pour les chômeurs hautement qualifiés. Le volet fribourgeois du dossier, en revanche, est terriblement compliqué. Au point que les députés au Grand Conseil Jean-Noël Gendre (ps) et Charles Brönnimann (udc), soutenus par une douzaine de cosignataires, ont interpellé le Conseil d'Etat à son sujet à la fin de l'année dernière. Motif: le canton aurait raté, en 2004, la possibilité d'héberger le centre romand d'InnoPark, et les substantielles subventions fédérales censées l'accompagner.

Explications: l'histoire commence en 2003. Jean-Daniel Gander, de la Fernfachhochschule (haute école) de Winthertour et instigateur du projet, étudie alors la possibilité d'implanter la plate-forme romande d'InnoPark à Fribourg. Un centre dans lequel les chômeurs sélectionnés doivent pouvoir développer des projets novateurs, sous la houlette d'un responsable InnoPark. Le programme a déjà pour partenaire local Narcisse Niclass, à la tête entre autres du magazine “IROmag“, et table sur la collaboration du Service public de l’emploi. Ses promoteurs convoquent alors les responsables économiques de la région, dont Michel Pittet, conseiller d'Etat à l'Economie et à l'emploi de l'époque. Leur est présenté le projet qui, selon MM. Gander et Niclass, pourrait permettre au canton de toucher quelque 500 000 francs de subventions fédérales. Fin de l'acte I.

Le rôle de Marc Genilloud

Quatre ans plus tard, le projet est aux oubliettes. Alors qu'ont été créés des entres à Genève et à Yverdon (le 1er juin 2007, voir notre édition du 18 juillet 2007). C'est d'ailleurs dans ce dernier que seront accueillis les chômeurs fribourgeois qui veulent profiter de la mesure d'accompagnement. Celle-ci figure depuis peu au catalogue des offices régionaux de placement fribourgeois, mais ne peut pas être appliquée dans le canton, puisqu'il ne compte pas de centre justement.

D'où l'interrogation des députés, soulevée par un article du journal “L’Objectif“: “Pourquoi, dans un canton comme le nôtre, qui vise à l’excellence en termes de promotion économique, en arrive-t-on à pareil gâchis (places de travail, investissement, etc.)?“. Mis en cause également, le rôle de Marc Genilloud, chef du Service public de l’emploi, dans la non-réalisation du projet. Acteur clé du second acte, Narcisse Niclass l’accuse, ainsi que des acteurs proches de lui, d’avoir fait capoter le projet. Tandis que Jean-Daniel Gander, atteint dans sa santé, ne peut plus commenter les faits.

Site d'Yverdon viable

En face, en revanche, on ne s'affole guère autour de cette vieille affaire. “Nous étions d'accord sur le principe“, se souvient Michel Pittet. “Mais nous n'avons pas trouvé de solution pour que le projet soit géré de manière fiable. Impossible dès lors de déboucher sur du concret.“ Même son de cloche du côté des autres concernés. Au banc des accusés, Marc Genilloud évoque pour sa part le problème du financement du projet. “La Confédération aurait versé 80 francs par jour et par demandeur d'emploi. C'est le tiers de ce que ça aurait coûté et le canton aurait dû payer le reste! On a laissé croire que Fribourg a perdu de l'argent, mais c'est faux! Ce projet, était un cheval de Troie“. Aujourd'hui pourtant, ses services proposent la mesure et la structure d'Yverdon est viable. C'est que l'InnoPark actuel est un projet de 2006. Le concept, l'origine et le nom sont certes semblables à ceux de 2003, mais le tout est ficelé différemment: il est devenu mesure fédérale obligatoire, placé sous l'égide du Seco.

Au Conseil d'Etat maintenant d'écrire l'épilogue de cette pièce en deux temps. Ironie du sort: une antenne d'InnoPark version 2 pourrait voir le jour à Fribourg d'ici là. François Egger, l'actuel directeur de la structure d'Yverdon, espère en effet ouvrir au plus tôt un bureau dans le canton. Et les acteurs économico-politiques de la région n'y voient pas d'inconvénient.

La Liberté -12 janvier 2008 - Linda Bourget