L'inventeur de le l'EPFL ne cache pas sa déception : la serpentine se fera à l'étranger

Contraint de se contenter du bout de piste déjà construit à Ouchy, le père de cette capsule  fustige la frilosité de la Suisse.

Sa voix suggère, si ce n'est de la déception, du moins une certaine lassitude. Il faut dire que Bernard Saugy travaille depuis vingt ans à la réalisation de la Serpentine. Cette capsule de transport automatique révolutionnaire que les Lausannois ont pu découvrir depuis quelques mois sur les quais d'Ouchy. Hier, le quotidien 24 heures révélait que la Municipalité de la capitale vaudoise suspendait le versement des crédits prévus. Réaction.

Bernard Saugy, la Municipalité a décidé de ne pas vous verser le crédit nécessaire à l'aboutissement du projet d'Ouchy. Expliquez-nous...

C'est une décision logique qui résulte de l'attitude de l'Office fédéral des transports (OFI), lequel s'est récemment jugé incompétent pour poursuivre l'homologation de ce mode de transport.

Qu'est que cela vous inspire ?

Sur le plan commercial, c'est un coup sévère, car on pensait pouvoir terminer le projet pilote et l'exploiter dès cet été. Sur le plan technique en revanche, la piste de 300 mètres d'Ouchy nous permet déjà de faire les essais. C'est la première fois qu'on la teste en site réel. Cela doit aussi nous permettre de démontrer notre technique à d'autres pays moins frileux.

Vous trouvez la Suisse craintive par rapport à ce projet ?

Oui. La Suisse fait preuve de frilosité. En 1990, on avait un bon bout d'avance. Aujourd'hui, plusieurs pays européens se sont lancés dans l'exploration de ce type de véhicules intelligents. Dans ce contexte, la France ou la Hollande se montrent plus disposées à faire des essais.

Est-ce que finalement la Serpentine verra le jour d'abord à l'étranger ?

Ces derniers temps, j'en ai eu l'impression, oui. Nous avons un projet en Autriche et, là-bas, on a admis sans autre que les législations s'appliquaient différemment dans le cadre d'un projet pilote.

Quels sont les obstacles auxquels vous vous heurtez en Suisse ?

Ce sont des problèmes d'autorisations. C'est normal car on travaille sur quelque chose qui n'a jamais été réalisé. Mais ces difficultés administratives prennent beaucoup de temps. Quand j'ai débuté le projet, il y a vingt ans, je savais que ce serait long. Mais pour moi, long c'était cinq, dix ans... Paradoxalement, dans les transports publics, il est difficile de faire bouger les choses.

Quand pensez-vous aboutir ?

Je crois qu'il y a une dynamique d'intérêt autour de ce type d'expériences aujourd'hui. Nous gardons bon espoir que dans l'année à venir, d'autres projets soient lancés. La liaison entre l'EPFL et l'université est d'ailleurs prévue pour 2003.

Fréderic Vassaux, dimanche.ch, 05.05.2002