_ No 22 - automne 2010 Print

 

Requiem, feu le train du XXIe siècle

Prenez un train moderne, carrossé comme un avion, auquel vous coupez les ailes et enlevez les roues. Ce véhicule, propulsé par un moteur électrique linéaire, circule dans un tunnel avec un vide d'air partiel comme à 15'000 mètres d'altitude. Il y a 40 ans que Rodolphe Nieth a eu cette idée. Les avancés technologiques, les développements et les expérimentations lui ont toujours donné raison. Pourquoi rien n'a bougé?? L'inventeur est philosophe?: «Nous sommes en Suisse. Nos politiciens réfléchissent lentement, parfois avec trop de prudence. En 1974, je disais déjà, si je vois le premier coup de pioche de ce chantier, je serai content».

 

LE CONCEPT Cabine pressurisée et climatisée, comme un avion. Navettes spacieuses, longues de 80 à 130 mètres, pour 200 à 400 personnes. Circulation à plus de 400 km/h en tunnels à 50 ou 100 mètres sous la surface. Tubes de 5 mètres de diamètre avec vide d'air. Le sous-sol helvétique est idéal pour ce type de construction. Les seules emprises en surface seraient les sorties d'ascenseurs pour les gares souterraines et des puits techniques tous les 15?km. Les objections - techniques, économiques, sécuritaires - ont été levées. L'écologie ne peut pas rêver d'un meilleur projet, les passagers non plus?: Genève - Lausanne en 8?minutes. Genève?-?Zurich en 40?minutes.

LA TECHNIQUE SWISSMETRO est en lévitation grâce à la force magnétique. Des électro-aimants soulèvent le véhicule qui ne subit aucun frottement mécanique. Le guidage latéral suit le même principe. Pour le lancement, il suffit d'un «moteur» tous les 200 mètres et, à pleine vitesse, un tous les 5 km. Le besoin en énergie est faible. A titre de comparaison pour un passager-km, le TGV à 300 km/h consomme 100 Wh, une voiture 570 Wh à 120 km/h et SWISSMETRO seulement 72 Wh à 400 km/h.

LA SÉCURITÉ Toute collision est totalement exclue. Les rames se déplacent en sens unique, en cadence, chacune dans un tube. En cas de panne de moteur, le véhicule est freiné automatiquement par la résistance électrique, tombe de 2 cm sur ses patins et peut regagner la station suivante avec un moteur autonome. Les déraillements sont impossibles, pas de danger d'incendie non plus, en raison du choix des matériaux, de l'absence de carburant et de la rareté de l'air. Le confort est supérieur à celui du meilleur avion. L'autonomie en air d'une cabine est de 4 heures, mais la pression serait rétablie dans le tunnel en 150 secondes.

LES MAUVAISES QUESTIONS Des coûts démesurés?? Le tronçon Genève - Lausanne en 2003 aurait coûté un peu moins que la capitalisation de SWISS, soit 3,5 milliards. La liaison Genève - Lausanne - Berne - Lucerne - Zurich - St-Gall, en 2010 aurait été réalisée pour le budget des NLFA?: moins de 20 milliards pour 330 km et les infrastructures.

Des déblais importants et gênants?? Pour l'ensemble du réseau la ligne du Plateau plus la liaison Bâle - Bellinzona via Lucerne, et l'aéroport de Bâle relié à Zurich, le volume à excaver est égal à la totalité des tunnels routiers réalisés en Suisse. C'est inférieur au volume des tunnels des NLFA.

Ce n'est pas le moment?? Un tel chantier dure de 10 à 15 ans. Il génère plus de 12'000 emplois. Il dope la recherche et le développement de nouvelles technologies. Nous avons trouvé les fonds pour les nouveaux tunnels du Gothard. Avec ce complément dans nos réseaux de transport, les CFF gagneraient tout un trafic capillaire. Chaque point de Suisse pourrait être atteint en moins de 90 minutes. Notre pays deviendrait une seule agglomération.

Les frais d'exploitation seront démesurés?? La dernière étude, remise en juin 2003 au Conseil fédéral, montre que des billets, Bâle?-?Zurich à 20 francs ou Genève?-?Lausanne à 18 francs, seraient très attractifs. Les besoins en énergie sont faibles et les frais d'entretien largement inférieurs à ceux d'un métro conventionnel. Les questions de sécurité sont simplifiées. Pas de déprédation, pas de problème atmosphérique, peu de consommation d'énergie, peu d'usure du matériel.

LE SEUL PROBLÈME Dans ce dossier, les politiciens ont fait preuve d'un manque de vision et de courage.
NN

En juin 2010, le projet à été condamné par nos leaders – case tiroir pour SWISSMETRO.
VERS L'INFINI ET AU-DELÀ
La Suisse alémanique n'a jamais torpillé le projet. Simplement, elle ne s'y intéressait pas. Il faut noter, qu'en profondeur, ce projet faisait peur aux CFF et il était clairement annoncé qu'il fallait laisser passer le projet des NLFA. Initialement, le secrétariat de Swissmetro SA était à Genève, sous contrôle de Pierre Weiss. Mais en Suisse, il vaut mieux avoir une mauvaise idée à Zurich qu'une bonne au bout du Léman. Nos politiciens romands sont toujours à la traîne et absents des grands dossiers. L'Allemagne vend son Maglev et a construit en Chine la ligne commerciale de Shanghai-aéroport. L'aventure continue...

Rodolphe Nieth avec le Dr Pierre Triponez,
dernier président de SWISSMETRO SA