_ No 16 - printemps 2005 Print

Le chômage rapporte

Après les 30 glorieuses, nous avons crû que le plein emploi c'était pour toujours. Le mythe de la civilisation des loisirs nous a empoisonné l'existence. Comme s'il n'y avait qu'un schéma de vie: naître, s'instruire, travailler pour vivre des loisirs obligatoires et mourir. Certains illusionnistes ont lancé le concept de la croissance zéro, voire le retour vers un passé récent, déclaré époque idéale. Que d'illusions perdues.

Malins comme nous sommes, nous avons crû que la Suisse serait toujours un cas à part. C'est le syndrome de nos dernières 200 années d'histoire qui nous ont tenues à l'écart et à l'abri des conflits européens. Nous sommes sous la main de St-Nicolas-de-Flüe et on peut dormir tranquille.

En gagnant 3 francs sur 4 à l'exportation et avec un monde en expansion, l'avenir ne pouvait qu'être rose. On se permettait le luxe de mettre en place des lois restrictives et contraignantes pour notre industrie d'exportation. Les centres de recherche mêmes étaient combattus. Le tourisme, notre troisième industrie, était aussi freiné de tous côtés. Avec la tornade asiatique, le réveil risque d'être brutal. Nous pourrons toujours cirer les chaussures des Chinois en visite chez nous.

Seulement pour le canton de Fribourg, le chômage c'est un budget de 60 millions. imaginez pour la Confédération! Que fait-on avec tout cet argent réinjecté dans le système? Pas grand-chose. C'est le tube d'oxygène qui facilite la respiration d'un malade, le poumon d'acier contraignant. Les études sont là, il nous faut créer plus de 250'000 postes de travail pour retrouver le moral et le plein emploi. C'est loin des 150'000 chômeurs qui nous sont annoncés. Comme nos voisins, nous avons vite appris à tricher avec les statistiques. Mais avec ces magouilles, quel avenir est promis aux jeunes de 20 à 25 ans à la recherche d'un premier emploi? Ils étaient plus de 20'000 en décembre 2004. Cette demande des chômeurs ainsi que des personnes sous-employées représente 13,5 % des travailleurs. C'est un potentiel énorme pour augmenter notre productivité si nous faisons preuve de souplesse et de réalisme.

La formation continue doit évoluer. De cerise sur le gâteau réservée aux bons employés elle doit devenir une activité revitalisante et valorisante Chaque ouvrier ou employé motivé devrait avoir accès à un savoir supplémentaire, mais cessons de croire que c'est l'entreprise qui doit paier. Arrêtons de penser qu'une loi, qu'une obligation, augmente automatiquement les compétences des habitants de ce pays. Les programmes d'occupations bidons sont à bannir rapidement. Les chiffres de la réalité genevoise sont là. C'est le canton qui offre le plus aux chômeurs et c'est le canton qui a le plus de chômeurs. II faut être honnête, se recycler, se former, retourner à l'école, c'est un effort. On n'apprend pas en tuant le temps. Quand on parle avec des chômeurs sur le genre de formations qui leur ont été offertes, leurs commentaires sont édifiants. Par vagues, on envoie tout le monde suivre des cours de langues, ou suivre des cours d'informatique, ou des cours pour se mettre à son compte. Sans parler des séances d'information obligatoires sur les droits du chômeur et les cours d'introduction qui nivellent par le bas

Les agences de placement, les offices ou services du chômage, ne créent pas de postes de travail, ou très peu, les leurs. Donc la solution ne viendra que de la reprise économique Notre pays a déjà vécu des heures plus noires mais le moral était meilleur. L'esprit combatif était présent et les Suisses osaient immigrer pour placer leurs compétences. Les sondages, depuis 5 ans, placent l'avenir professionnel comme l'inquiétude numéro un des Suisses. Dans un pays qui est encore dans le peloton des meilleurs, c'est inquiétant ce peu de confiance en soi et dans l'avenir immédiat. Nous vous proposons de passer à l'action en stoppant les rêveurs et remettant l'école (la formation) au milieu du paysage helvétique. Notre matière grise est un filon inépuisable et les personnes qui font l'effort de se former et qui veulent travailler doivent être récompensées. La fable de jean de la Fontaine, "La cigale et la fourmi", thème ringard certes, mais combien vrai, doit être réinscrite au programme primaire.

Loisirs ou formation, pour travailler heureux il faut choisir!